Comment fonctionne la retraite progressive ? Qui y a droit ?
Le dispositif de retraite progressive, qui permet de passer en douceur du statut d'actif à celui de retraité grâce à l'aménagement de son temps de travail à la fin de sa carrière professionnelle, est en fait mal connu en France. Pourtant, la retraite progressive permet de percevoir une partie de sa pension de retraite avant l'âge légal de départ tout en continuant à travailler à temps partiel.
Une bonne solution pour mieux vivre et mieux gérer le passage de la vie active à la retraite, qui peut être compliqué pour de nombreux actifs. D'autre part, en continuant à travailler, la retraite progressive permet d'acquérir de nouveaux droits pour sa retraite définitive. Les salariés du secteur privé, du secteur agricole et les travailleurs indépendants ont le droit de prendre une retraite progressive. Pour les autres actifs, comme les fonctionnaires, par exemple, cette cessation progressive d'activité n'est pas possible. Pour les salariés qui dépendent de régimes spéciaux notamment, la retraite progressive n'existe pas non plus mais peut être remplacée dans certains cas par d'autres dispositifs.
Qu'appelle-t-on la retraite progressive ?
On appelle retraite progressive un dispositif qui permet, sous certaines conditions, de partir à la retraite avant l'âge légal. Concrètement, la retraite progressive vous donne la possibilité de continuer à travailler à temps partiel, dans le cadre d'une ou de plusieurs activités professionnelles, tout en commençant à percevoir une partie de votre pension de retraite de base et complémentaire.
Pour les salariés du secteur privé, le travail à temps partiel (ou plusieurs activités à temps partiel cumulées) occupé en prenant sa retraite progressive doit avoir une durée comprise au total entre 40 % et 80 % de la durée légale ou conventionnelle du travail qui est en vigueur dans leur entreprise.
De plus, en prenant une retraite progressive, en continuant à travailler et donc aussi à cotiser à vos retraite de base et complémentaire, vous avez la possibilité d'acquérir de nouveaux droits (des trimestres pour la retraite de base et des points pour la retraite complémentaire) qui seront pris en compte au moment de la liquidation définitive de votre retraite.
À savoir : pendant votre retraite progressive, mais seulement avec l'accord de votre employeur, vous pouvez continuer à cotiser pour votre retraite de base et complémentaire comme si vous étiez à temps plein. Des cotisations qui sont donc considérées dans le calcul du montant de votre retraite définitive.
Il faut savoir que pour les salariés relevant du régime général, il est aussi possible de bénéficier d'une retraite progressive de leurs caisses de retraite complémentaire telles que, par exemple, l'Agirc-Arcco, le régime de retraite complémentaire obligatoire des salariés du secteur privé, ou l'Ircantec, le régime complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
Qui peut prétendre à une retraite progressive ?
Le dispositif de retraite progressive est ouvert dans les mêmes conditions aux salariés du secteur privé, à ceux du secteur agricole, ainsi qu'aux agents contractuels de la fonction publique. La retraite progressive concerne également les artisans et commerçants travailleurs indépendants qui peuvent en bénéficier de la même manière que les actifs cités précédemment.
À savoir : la retraite progressive est aussi possible pour les salariés travaillant déjà à temps partiel et qui remplissent les conditions requises.
En revanche, certaines situations d'emploi ou des activités professionnelles ne permettent pas de bénéficier d'une retraite progressive. C'est le cas pour :
- les voyageurs représentants placiers (VRP), à moins de pouvoir justifier de la durée à temps partiel de leur travail ;
- les mandataires sociaux et dirigeants de sociétés commerciales, c'est-à-dire les personnes qui n’ont pas le statut de salarié et qui ne peuvent pas produire un contrat de travail ;
- les artisans taxis affiliés à l'assurance volontaire accidents du travail et maladies professionnelles (AT/MP).
À noter : les salariés en forfait jours sur l'année, c'est-à-dire ceux dont le temps de travail n'est pas compté en heures mais qui doivent travailler un certain nombre de jours dans l'année, étaient auparavant exclus du dispositif de retraite progressive. Ce n'est plus le cas depuis le 1er janvier 2022.
Les salariés qui dépendent de régimes spéciaux de retraite ne peuvent pas non plus partir à la retraite progressivement.
C'est le cas notamment des salariés qui dépendent du régime spécial des industries électriques et gazières (CNIEG), des clercs et employés de notaires qui dépendent d'une caisse de retraite et de prévoyance spécifique.
D'autres salariés rattachés à des régimes spéciaux ne peuvent pas non plus bénéficier du dispositif de retraite progressive comme les fonctionnaires, mais aussi les exploitants agricoles, les professions libérales, les agents de la SNCF, ou encore les personnels navigants de l'aéronautique civile.
Toutefois, toutes ces catégories disposent d'autres possibilités pour commencer à percevoir leur retraite toute en continuant à travailler.
Ainsi, les exploitants agricoles, à condition d'être chef d'exploitation ou d'entreprise agricole qui exerce son activité à titre exclusif, peuvent partir en retraite progressivement. Mais ils doivent pour cela souscrire un Plan de cession progressive de leur exploitation (PCPEA), mettre en valeur du foncier ou exploiter des productions hors sol, ainsi que céder une partie des parts sociales détenues pour ceux d'entre eux qui exercent leur activité au sein d’une société.
Les professions libérales ne peuvent pas non plus profiter du dispositif de retraite progressive sauf si elles ont été un moment salariées du secteur privé.
Les agents de la SNCF ne disposent pas du dispositif de retraite progressive comme décrit plus haut. Mais leur statut prévoit malgré tout ce que l'on appelle une convention de cessation progressive d’activité (CPA) qui doit être signée entre l'employeur et le salarié concerné. Ce dispositif est géré par la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF (CPRPSNCF) et peut prendre 3 formes : la CPA formule dégressive, la CPA formule fixe et le temps partiel de fin de carrière.
Enfin, les personnels navigants de l'aéronautique civile, qui dépendent de la Caisse de retraite complémentaire du personnel navigant professionnel de l’aéronautique civile (CRPN), ne peuvent pas non plus bénéficier du dispositif de retraite progressive, mais ils ont la possibilité de prendre leur retraite dans le cadre du temps alterné, c'est-à-dire un système de liquidation partielle de leurs droits à la retraite en temps alterné et, lorsqu'ils cessent leur activité de navigant, de liquidation de leurs droits non pris en compte en temps alterné.
Les conditions pour bénéficier d'une retraite progressive
Actuellement, et en attendant les effets de la réforme des retraites récemment votée, il est possible pour les actifs qui dépendent de l'Assurance retraite du régime général de la Sécurité sociale de prendre une retraite progressive à partir de l'âge de 60 ans, et donc d'avoir une activité professionnelle à temps partiel et de toucher en même temps une partie de leur pension de retraite.
Autre condition pour bénéficier de ce dispositif qui permet de passer progressivement du monde des actifs à celui des retraités : justifier d’une durée d’assurance retraite équivalente à au moins 150 trimestres, tous régimes de retraite de base obligatoires confondus.
Enfin, partir en retraite progressive veut dire aussi exercer une ou plusieurs activités salariées à temps partiel en parallèle de la perception d'une partie de sa pension de retraite.
Le dispositif de retraite progressive reste applicable pour ses bénéficiaires tant qu'ils remplissent les conditions requises.
C'est pourquoi les caisses de retraite qui proposent cette possibilité adressent un questionnaire aux personnes concernées tous les ans après la date de début de leur retraite progressive pour savoir si elles peuvent toujours justifier d'une durée de travail à temps partiel ou à temps réduit, l'une des conditions pour bénéficier d'une retraite progressive.
Sans réponse de l'assuré à ce questionnaire, sa retraite progressive est suspendue. De la même manière, quand un bénéficiaire d'une retraite progressive cesse son activité à temps partiel, ou s'il reprend une activité à temps complet, il perd ses droits à ce dispositif.
Comment demander une retraite progressive ?
Pour demander sa retraite progressive, un salarié du régime général, c'est-à-dire qui relève de l'Assurance retraite du régime général de la Sécurité sociale, doit faire une demande auprès de sa Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) via un document cerfa dédié, de préférence entre 4 et 6 mois avant la date de retraite progressive souhaitée, et faire remplir à son employeur une attestation de retraite progressive.
Cette demande doit être accompagnée :
- d'une photocopie de chaque contrat de travail à temps partiel ou à temps réduit en cours à la date du départ en retraite progressive ;
- d'une photocopie d'une carte d'identité, d'un passeport ou d'un titre de séjour ;
- d'une photocopie des 2 derniers avis d'imposition sur le revenu ;
- d'un relevé d'identité bancaire (RIB) ;
- d'une attestation de chaque employeur qui précise les durées de travail à temps partiel et à temps complet applicable dans l'entreprise, exprimées en heures, ou la durée de travail à temps réduit et la durée maximale légale, réglementaire ou conventionnelle exprimée en jours.
Pour les non-salariés, cette demande de retraite progressive doit aussi comporter :
- le certificat de radiation du registre du commerce et des sociétés, du répertoire des métiers ou du registre des entreprises des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, ou le certificat de cessation d'activité du chef d'entreprise délivré par la chambre des métiers ;
- et, selon les secteurs d'activité, une attestation de radiation du tableau de l'ordre professionnel dont ils dépendaient, une attestation de radiation des rôles de la contribution économique territoriale, une attestation de radiation du répertoire national des agents commerciaux, ou encore une attestation de cessation d'activité délivrée par la Mutualité sociale agricole (MSA).
Pour les travailleurs indépendants, la demande de retraite progressive adressée à la Carsat vaut également, sans autres démarches de leur part, pour leur retraite complémentaire obligatoire s'ils dépendent de la MSA, de la Sécurité sociale des indépendants (SSI), intégrée au régime général de la Sécurité sociale, ou du régime des professions libérales.
Ils doivent, en revanche, déposer une demande spécifique pour bénéficier d'une retraite progressive de l'Argic-Arrco, ou encore de l'Ircantec, par exemple, s'ils ont dépendu de ces régimes au cours de leur carrière professionnelle.
Quel montant de pension avec le dispositif de retraite progressive ?
En optant pour partir à la retraite en douceur grâce au dispositif de retraite progressive, et si vous remplissez les conditions requises pour en bénéficier, vous commencez à toucher une partie de votre pension de retraite tout en continuant à travailler un peu, un dispositif que l'on peut qualifier de retraite provisoire.
Le montant de la pension qu'il est ainsi possible de toucher dépend et est calculée sur la base des droits d'assurance retraite acquis au moment où vous partez en retraite progressive.
Dans tous les cas, la part de la pension perçue est proportionnelle au temps de travail effectué.
Par exemple, si vous continuez à travailler pour un temps de travail égal à 80 % de la durée légale du travail, votre pension de retraite progressive est de 20 %, ou encore de 60 % si votre temps de travail est de 40 %.
Une proportion qui change au gré du temps de travail de vos activités professionnelles à temps partiel si vous en changez.
Cette manière de calculer la pension perçue pendant la retraite progressive est la même pour les assurés du régime général, pour ceux du régime des salariés et non-salariés agricoles (MSA) et des régimes des professions libérales.
Pour les travailleurs indépendants qui choisissent de partir progressivement à la retraite, le montant de la pension qu'ils touchent est calculée en fonction de la diminution de leurs revenus professionnels et correspond à un pourcentage de leur retraite de base et complémentaire.
Par exemple, si cette baisse de revenus est de 40 %, le travailleur indépendant perçoit une pension de retraite progressive équivalente à 40 % de la pension définitive.
D'autre part, en ce qui concerne la part de la pension de retraite complémentaire versée en cas de retraite progressive, cette dernière peut faire l'objet d'une minoration si l'assuré n’a pas atteint l’âge légal de la retraite (soit 62 ans actuellement) et/ou s’il ne justifie pas du nombre de trimestres exigés pour bénéficier de la retraite de base à taux plein.
Au contraire, cette part de retraite complémentaire peut être majorée pour les assurés en retraite progressive qui ont des enfants.
Retraite progressive et réforme des retraites : quels impacts ?
La réforme des retraites votée récemment par le Parlement va entrer en vigueur dans quelques mois. Si le changement le plus important suite à cette réforme, qui concerne essentiellement les régimes de retraite de base, est le recul de l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans pour les personnes nées à compter du 1er septembre 1961, d'autres pans du système des retraites français vont aussi connaitre des modifications prochainement.
Le dispositif de la retraite progressive est ainsi concerné par cette réforme des retraites à venir. Cette possibilité de partir à la retraite plus tôt, soit 2 ans avant l'âge légal de départ à la retraite, permettra donc, en raison du recul de l'âge légal de départ à la retraite, aux générations nées à partir du 1er janvier 1968 de partir en retraite progressive à partir de l'âge de 62 ans, contre 60 ans actuellement.
D'autre part, la retraite progressive sera également accessible aux fonctionnaires, ce qui n'était pas le cas avant la réforme des retraites, et dans les mêmes conditions que celles requises pour les salariés du secteur privé et les travailleurs indépendants.
Il est seulement prévu pour le moment, en attendant la publication du décret d'application, que les fonctionnaires en retraite progressive ne pourront pas travailler en parallèle moins d'un mi-temps.
Enfin, pour tous les bénéficiaires, le délai de demande de retraite progressive, qui est actuellement de 4 à 6 mois, devrait être ramené à 2 mois.
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